Après 64 ans d’échecs, la RDC doit oser un homme hors des circuits politiques ; l’impératif d’une transition avec le Dr Denis Mukwege se précise
Par Jean-Marie Kayembe
La République Démocratique du Congo traverse un carrefour critique de son histoire et affronte une crise multidimensionnelle où se mêlent guerre d’agression et d’occupation dans l’Est, menée par le Rwanda en utilisant ses proxys pour exploiter les ressources minières, dilapidation et détournement des fonds de l’État à l’interne pour un enrichissement illicite, et impératif de rupture avec un système politique oligarchique qui a institutionnalisé le clientélisme, le clanisme et le népotisme depuis des décennies, illustrant l’urgence d’une refonte radicale. Depuis son indépendance en 1960, le pays a été piégé dans un cycle infernal de régimes prédateurs, où chaque ère politique a reproduit, avec une constance tragique, le même schéma d’antivaleurs. Les militaires, présentés un temps comme garants de l’ordre, ont échoué à incarner l’espoir et à bâtir un État fort à l’image du Léviathan : Mobutu Sese Seko, militaire, durant ses trois décennies de règne autocratique, a institutionnalisé le pillage des ressources et étouffé toute velléité démocratique. Joseph Kabila, militaire, propulsé au pouvoir après l’assassinat mystérieux de son père Laurent-Désiré Kabila en 2001, a perpétué cette logique prédatrice, transformant l’État en une machine à servir les intérêts d’une oligarchie sans visage.
L’opposition politique, longtemps perçue comme une alternative salvatrice, a elle aussi déçu. Le parti historique ayant lutté pendant 32 ans contre les dictatures, l’UDPS, a fait reculer le pays d’un siècle en arrière une fois aux commandes. Le deal à l’africaine de 2018, scellé entre Joseph Kabila et Félix Tshisekedi, a révélé une collusion cynique : le pouvoir, même sous une fausse étiquette d’« opposition », reste un jeu de chaises musicales entre les mêmes acteurs, recyclant les réseaux de corruption et les pratiques clientélistes. Aujourd’hui, Tshisekedi, enlisé dans les alliances avec les mêmes acteurs, vestiges des régimes Mobutu et Kabila, incarne l’échec d’une génération politique incapable de rompre avec les démons du passé. Des entreprises familiales continuent de piller les minerais au Katanga au lieu de financer l’armée dans l’Est, les caisses de l’État se vident au profit d’une élite vorace, et le spectre d’un retour en force de Kabila, comme l’a manifestement souligné Shadari à Jeune Afrique, prêt à reprendre le pouvoir, ou comme pour Nanga à Goma « détruire le monstre », rappelle que pour eux, la lutte se résume à une guerre de prédation des richesses du pays entre quelques acteurs politiques aux dépens d’une population appauvrie.
Comment croire, dans ce contexte, qu’un changement puisse naître des mêmes cercles qui ont orchestré le naufrage du pays ? Depuis quand refait-on les mêmes erreurs en espérant un résultat différent ? La RDC est prise en étau entre un pouvoir actuel délégitimé et une opposition dévoyée, tous deux englués dans un système qui sacrifie l’intérêt général sur l’autel de l’enrichissement personnel. Il serait complètement amnésique de miser sur ceux qui mènent une lutte armée qui laisse le sang de milliers de nos compatriotes gésir sur le sol dans les zones occupées et dont le lead est conduit par Corneille Nanga, qui a truqué les élections de 2018 inaugurant ainsi le long chapitre de la souffrance du peuple congolais. Joseph Kabila ? Moïse Katumbi ? Et si l’hôpital cessait de se moquer benoîtement de la charité ?
C’est dans cette impasse historique que surgit l’urgence d’une transition citoyenne, portée par une figure hors des circuits traditionnels du pouvoir, et le Prix Nobel de la paix 2018, Dr Denis Mukwege, symbole mondial de résilience et d’intégrité, incarne cette rupture salvatrice. Homme de terrain, médecin des victimes oubliées de l’Est, il n’a jamais trempé dans les combines politico-financières, ni côtoyé les cercles du pouvoir ou de l’opposition institutionnelle. Son parcours, bâti sur l’action humanitaire et la défense des plus vulnérables, contraste radicalement avec l’héritage toxique des dirigeants passés.
Le choix est clair : persister dans l’illusion d’un système à bout de souffle et d’un statu quo mortifère ou se racheter dans une vision radicalement neuve en confiant le destin national à un leader dont la légitimité ne se nourrit pas des urnes truquées, mais de son engagement sans faille pour la dignité congolaise. L’heure n’est plus aux expédients politiques, aux demi-mesures, mais à l’audace d’une refondation citoyenne. La transition avec le Dr Denis Mukwege ne doit pas apparaître comme une option mais plutôt comme une nécessité vitale pour briser, enfin, la malédiction du « business as usual ».
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement la position éditoriale de Tamtam News.———————————————————————————-
Jean-Marie Kayembe est un Analyste indépendant et acteur socio-politique.